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CHAPITRE IX — LES COLÈRES DE NED LAND
Quelle fut la durée de ce sommeil, je l’ignore ; mais il dut être long, car il nous reposa complétement de nos fatigues. Je me réveillai le premier. Mes compagnons n’avaient pas encore bougé, et demeuraient étendus dans leur coin comme des masses inertes.
A peine relevé de cette couche passablement dure, je sentis mon cerveau dégagé, mon esprit net. Je recommençai alors un examen attentif de notre cellule.
Rien n’était changé à ses dispositions intérieures. La prison était restée prison, et les prisonniers, prisonniers. Cependant le stewart, profitant de notre sommeil, avait desservi la table. Rien n’indiquait donc une modification prochaine dans cette situation, et je me demandai sérieusement si nous étions destinés à vivre indéfiniment dans cette cage.
Cette perspective me sembla d’autant plus pénible que, si mon cerveau était libre de ses obsessions de la veille, je me sentais la poitrine singulièrement oppressée. Ma respiration se faisait difficilement. L’air lourd ne suffisait plus au jeu de mes poumons. Bien que la cellule fût vaste, il était évident que nous avions consommé en grande partie l’oxygène qu’elle contenait. En effet, chaque homme dépense, en une heure, l’oxygène renfermé dans cent litres d’air, et cet air, chargé alors d’une quantité presque égale d’acide carbonique, devient irrespirable.
Il était donc urgent de renouveler l’atmosphère de notre prison, et, sans doute aussi, l’atmosphère du bateau sous-marin.
Là se posait une question à mon esprit. Comment procédait le commandant de cette demeure flottante ? Obtenait-il de l’air par des moyens chimiques, en dégageant par la chaleur l’oxygène contenu dans du chlorate de potasse, et en absorbant l’acide carbonique par la potasse caustique ? Dans ce cas, il devait avoir conservé quelques relations avec les continents, afin de se procurer les matières nécessaires à cette opération. Se bornait-il seulement à emmagasiner l’air sous de hautes pressions dans des réservoirs, puis à le répandre suivant les besoins de son équipage ? Peut-être. Ou, procédé plus commode, plus économique, et par conséquent plus probable, se contentait-il de revenir respirer à la surface des eaux, comme un cétacé, et de renouveler pour vingt-quatre heures sa provision d’atmosphère ? Quoi qu’il en soit, et quelle que fût la méthode, il me paraissait prudent de l’employer sans retard.
En effet, j’étais déjà réduit à multiplier mes inspirations pour extraire de cette cellule le peu d’oxygène qu’elle renfermait, quand, soudain, je fus rafraîchi par un courant d’air pur et tout parfumé d’émanations salines. C’était bien la brise de mer, vivifiante et chargée d’iode ! J’ouvris largement la bouche, et mes poumons se saturèrent de fraîches molécules. En même temps, je sentis un balancement, un roulis de médiocre amplitude, mais parfaitement déterminable. Le bateau, le monstre de tôle venait évidemment de remonter à la surface de l’Océan pour y respirer à la façon des baleines. Le mode de ventilation du navire était donc parfaitement reconnu.
Lorsque j’eus absorbé cet air pur à pleine poitrine, je cherchai le conduit, « l’aérifère, » si l’on veut, qui laissait arriver jusqu’à nous cette bienfaisante effluve, et je ne tardai pas à le trouver. Au-dessus de la porte s’ouvrait un trou d’aérage laissant passer une fraîche colonne d’air, qui renouvelait ainsi l’atmosphère appauvrie de la cellule.
J’en étais là de mes observations, quand Ned et Conseil s’éveillèrent presque en même temps, sous l’influence de cette aération revivifiante. Ils se frottèrent les yeux, se détirèrent les bras et furent sur pied en un instant.
« Monsieur a bien dormi ? me demanda Conseil avec sa politesse quotidienne.
— Fort bien, mon brave garçon, répondis-je. Et, vous, maître Ned Land ?
— Profondément, monsieur le professeur. Mais, je ne sais si je me trompe, il me semble que je respire comme une brise de mer ? »
Un marin ne pouvait s’y méprendre, et je racontai au Canadien ce qui s’était passé pendant son sommeil.
« Bon ! dit-il, cela explique parfaitement ces mugissements que nous entendions, lorsque le prétendu narwal se trouvait en vue de l’Abraham-Lincoln.
— Parfaitement, maître Land, c’était sa respiration !
— Seulement, monsieur Aronnax, je n’ai aucune idée de l’heure qu’il est, à moins que ce ne soit l’heure du dîner ?
— L’heure du dîner, mon digne harponneur ? Dites, au moins, l’heure du déjeuner, car nous sommes certainement au lendemain d’hier.
— Ce qui démontre, répondit Conseil, que nous avons pris vingt-quatre heures de sommeil.
— C’est mon avis, répondis-je.
— Je ne vous contredis point, répliqua Ned Land. Mais dîner ou déjeuner, le stewart sera le bien venu, qu’il apporte l’un ou l’autre.
— L’un et l’autre, dit Conseil.
— Juste, répondit le Canadien, nous avons droit à deux repas, et pour mon compte, je ferai honneur à tous les deux.
— Eh bien ! Ned, attendons, répondis-je. Il est évident que ces inconnus n’ont pas l’intention de nous laisser mourir de faim, car, dans ce cas, le dîner d’hier soir n’aurait aucun sens.
— A moins qu’on ne nous engraisse ! riposta Ned.
— Je proteste, répondis-je. Nous ne sommes point tombés entre les mains de cannibales !
— Une fois n’est pas coutume, répondit sérieusement le Canadien. Qui sait si ces gens-là ne sont pas privés depuis longtemps de chair fraîche, et dans ce cas, trois particuliers sains et bien constitués comme monsieur le professeur, son domestique et moi…
— Chassez ces idées, maître Land, répondis-je au harponneur, et surtout, ne partez pas de là pour vous emporter contre nos hôtes, ce qui ne pourrait qu’aggraver la situation.
— En tous cas, dit le harponneur, j’ai une faim de tous les diables, et dîner ou déjeuner, le repas n’arrive guère !
— Maître Land, répliquai-je, il faut se conformer au règlement du bord, et je suppose que notre estomac avance sur la cloche du maître-coq.
— Eh bien ! on le mettra à l’heure, répondit tranquillement Conseil.
— Je vous reconnais là, ami Conseil, riposta l’impatient Canadien. Vous usez peu votre bile et vos nerfs ! Toujours calme ! Vous seriez capable de dire vos Grâces avant votre Bénédicité, et de mourir de faim plutôt que de vous plaindre !
— A quoi cela servirait-il ? demanda Conseil.
— Mais cela servirait à se plaindre ! C’est déjà quelque chose. Et si ces pirates, — je dis pirates par respect, et pour ne pas contrarier monsieur le professeur qui défend de les appeler cannibales, — si ces pirates se figurent qu’ils vont me garder dans cette cage où j’étouffe, sans apprendre de quels jurons j’assaisonne mes emportements, ils se trompent ! Voyons, monsieur Aronnax, parlez franchement. Croyez-vous qu’ils nous tiennent longtemps dans cette boîte de fer ?
— A dire vrai, je n’en sais pas plus long que vous, ami Land.
— Mais enfin, que supposez-vous ?
— Je suppose que le hasard nous a rendus maîtres d’un secret important. Or, si l’équipage de ce bateau sous-marin a intérêt à le garder, et si cet intérêt est plus grave que la vie de trois hommes, je crois notre existence très-compromise. Dans le cas contraire, à la première occasion, le monstre qui nous a engloutis nous rendra au monde habité par nos semblables.
— A moins qu’il ne nous enrôle parmi son équipage, dit Conseil, et qu’il nous garde ainsi…
— Jusqu’au moment, répliqua Ned Land, où quelque frégate, plus rapide ou plus adroite que l’Abraham-Lincoln, s’emparera de ce nid de forbans, et enverra son équipage et nous respirer une dernière fois au bout de sa grand’vergue.
— Bien raisonné, maître Land, répliquai-je. Mais on ne nous a pas encore fait, que je sache, de proposition à cet égard. Inutile donc de discuter le parti que nous devrons prendre, le cas échéant. Je vous le répète, attendons, prenons conseil des circonstances, et ne faisons rien, puisqu’il n’y a rien à faire.
— Au contraire ! monsieur le professeur, répondit le harponneur, qui n’en voulait pas démordre, il faut faire quelque chose.
— Eh ! quoi donc, maître Land ?
— Nous sauver.
— Se sauver d’une prison « terrestre » est souvent difficile, mais d’une prison sous-marine, cela me paraît absolument impraticable.
— Allons, ami Ned, demanda Conseil, que répondez-vous à l’objection de monsieur ? Je ne puis croire qu’un Américain soit jamais à bout de ressources ! »
Le harponneur, visiblement embarrassé, se taisait. Une fuite, dans les conditions où le hasard nous avait jetés, était absolument impossible. Mais un Canadien est à demi Français, et maître Ned Land le fit bien voir par sa réponse.
« Ainsi, monsieur Aronnax, reprit-il après quelques instants de réflexion, vous ne devinez pas ce que doivent faire des gens qui ne peuvent s’échapper de leur prison ?
— Non, mon ami.
— C’est bien simple, il faut qu’ils s’arrangent de manière à y rester.
— Parbleu ! fit Conseil, vaut encore mieux être dedans que dessus ou dessous !
— Mais après avoir jeté dehors geôliers, porte-clefs et gardiens, ajouta Ned Land.
— Quoi, Ned ? vous songeriez sérieusement à vous emparer de ce bâtiment ?
— Très-sérieusement, répondit le Canadien.
— C’est impossible.
— Pourquoi donc, monsieur ? Il peut se présenter quelque chance favorable, et je ne vois pas ce qui pourrait nous empêcher d’en profiter. S’ils ne sont qu’une vingtaine d’hommes à bord de cette machine, ils ne feront pas reculer deux Français et un Canadien, je suppose ! »
Mieux valait admettre la proposition du harponneur que de la discuter. Aussi, me contentai-je de répondre :
« Laissons venir les circonstances, maître Land, et nous verrons. Mais, jusque-là, je vous en prie, contenez votre impatience. On ne peut agir que par ruse, et ce n’est pas en vous emportant que vous ferez naître des chances favorables. Promettez-moi donc que vous accepterez la situation sans trop de colère.
— Je vous le promets, monsieur le professeur, répondit Ned Land d’un ton peu rassurant. Pas un mot violent ne sortira de ma bouche, pas un geste brutal ne me trahira, quand bien même le service de la table ne se ferait pas avec toute la régularité désirable.
— J’ai votre parole, Ned, » répondis-je au Canadien.
Puis, la conversation fut suspendue, et chacun de nous se mit à réfléchir à part soi. J’avouerai que, pour mon compte, et malgré l’assurance du harponneur, je ne conservais aucune illusion. Je n’admettais pas ces chances favorables dont Ned Land avait parlé. Pour être si sûrement manœuvré, le bateau sous-marin exigeait un nombreux équipage, et conséquemment, dans le cas d’une lutte, nous aurions affaire à trop forte partie. D’ailleurs, il fallait, avant tout, être libres, et nous ne l’étions pas. Je ne voyais même aucun moyen de fuir cette cellule de tôle si hermétiquement fermée. Et pour peu que l’étrange commandant de ce bateau eût un secret à garder, — ce qui paraissait au moins probable, — il ne nous laisserait pas agir librement à son bord. Maintenant, se débarrasserait-il de nous par la violence, ou nous jetterait-il un jour sur quelque coin de terre ? c’était là l’inconnu. Toutes ces hypothèses me semblaient extrêmement plausibles, et il fallait être un harponneur pour espérer de reconquérir sa liberté.
Je compris d’ailleurs que les idées de Ned Land s’aigrissaient avec les réflexions qui s’emparaient de son cerveau. J’entendais peu à peu les jurons gronder au fond de son gosier, et je voyais ses gestes redevenir menaçants. Il se levait, tournait comme une bête fauve en cage, frappait les murs du pied et du poing. D’ailleurs, le temps s’écoulait, la faim se faisait cruellement sentir, et, cette fois, le stewart ne paraissait pas. Et c’était oublier trop longtemps notre position de naufragés, si l’on avait réellement de bonnes intentions à notre égard.
Ned Land, tourmenté par les tiraillements de son robuste estomac, se montait de plus en plus, et, malgré sa parole, je craignais véritablement une explosion, lorsqu’il se trouverait en présence de l’un des hommes du bord.
Pendant deux heures encore, la colère de Ned Land s’exalta. Le Canadien appelait, il criait, mais en vain. Les murailles de tôle étaient sourdes. Je n’entendais même aucun bruit à l’intérieur de ce bateau, qui semblait mort. Il ne bougeait pas, car j’aurais évidemment senti les frémissements de la coque sous l’impulsion de l’hélice. Plongé sans doute dans l’abîme des eaux, il n’appartenait plus à la terre. Tout ce morne silence était effrayant.
Quant à notre abandon, à notre isolement au fond de cette cellule, je n’osais estimer ce qu’il pourrait durer. Les espérances que j’avais conçues après notre entrevue avec le commandant du bord s’effaçaient peu à peu. La douceur du regard de cet homme, l’expression généreuse de sa physionomie, la noblesse de son maintien, tout disparaissait de mon souvenir. Je revoyais cet énigmatique personnage tel qu’il devait être, nécessairement impitoyable, cruel. Je le sentais en-dehors de l’humanité, inaccessible à tout sentiment de pitié, implacable ennemi de ses semblables auxquels il avait dû vouer une impérissable haine !
Mais, cet homme, allait-il donc nous laisser périr d’inanition, enfermés dans cette prison étroite, livrés à ces horribles tentations auxquelles pousse la faim farouche ? Cette affreuse pensée prit dans mon esprit une intensité terrible, et, l’imagination aidant, je me sentis envahir par une épouvante insensée. Conseil restait calme, Ned Land rugissait.
En ce moment, un bruit se fit entendre extérieurement. Des pas résonnèrent sur la dalle de métal. Les serrures furent fouillées, la porte s’ouvrit, le stewart parut.
Avant que j’eusse fait un mouvement pour l’en empêcher, le Canadien s’était précipité sur ce malheureux ; il l’avait renversé ; il le tenait à la gorge. Le stewart étouffait sous sa main puissante.
Conseil cherchait déjà à retirer des mains du harponneur sa victime à demi suffoquée, et j’allais joindre mes efforts aux siens, quand, subitement, je fus cloué à ma place par ces mots prononcés en français :
« Calmez-vous, maître Land, et vous, monsieur le professeur, veuillez m’écouter ! »
– À SUIVRE –
1- Ned Land s’est réveillé en premier dans la cellule.
2- L’air dans la cellule devenait difficile à respirer avant d’être renouvelé.
3- Le Nautilus renouvelle son air uniquement grâce à des réactions chimiques.
4- Ned Land et Conseil se sont réveillés en même temps.
5- D’après Aronnax, l’équipage du Nautilus compte probablement une vingtaine d’hommes.
6- Ned Land pense que le Nautilus finira par être capturé par une frégate plus rapide et plus habile.
7- Le professeur Aronnax encourage activement Ned Land à organiser une révolte contre le Nautilus.
8- Le silence à bord du Nautilus inquiète Aronnax.
9- Ned Land attaque le stewart dès qu’il entre dans la cellule.
10- Nous savons exactement qui parle français à la fin du chapitre.
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Nous en sommes maintenant au neuvième chapitre. Aronnax et ses compagnons se réveillent après un long sommeil dans leur prison d’acier. Le scientifique remarque rapidement que l’air de leur cellule est déjà très appauvri. Il commence alors à réfléchir à la durée pendant laquelle l’air disponible dans la pièce pourrait leur suffire. Ses calculs sont étonnamment précis, même s’il n’en explique pas les mécanismes en détail.
Sa déclaration selon laquelle un être humain consomme l’oxygène contenu dans 100 litres d’air est presque exacte, à condition de prendre en compte les hypothèses suivantes :
- En une heure, un individu inhale et exhale environ 400 litres d’air.
- L’organisme extrait environ 4 % d’oxygène des 21 % présents dans l’air ambiant et y ajoute simultanément 4 % de dioxyde de carbone (CO₂).
- L’air devient impropre à la respiration lorsque la concentration en oxygène tombe en dessous de 9 % ou lorsque celle en CO₂ dépasse 10 %.
- Cela signifie que le même volume d’air ne peut être respiré que trois fois avant de devenir mortel en raison des seuils atteints.
Dans l’ensemble, l’hypothèse de Verne est donc correcte.
Cependant, les symptômes décrits, comme la détresse respiratoire, apparaissent beaucoup plus tôt que ce qu’il suggère.
Le véritable problème : l’excès de dioxyde de carbone
Curieusement, le manque d’oxygène n’est pas la principale cause des symptômes précoces. Le véritable problème est la saturation de l’air en CO₂. Le corps humain régule son réflexe respiratoire en fonction de la concentration de dioxyde de carbone dans le sang, et non du manque d’oxygène.
Si l’air inhalé contient trop de CO₂, celui-ci ne peut plus être correctement éliminé par l’expiration en raison de la différence de pression partielle. Cela entraîne une acidification du sang (acidose respiratoire). Ce phénomène est appelé hypercapnie ou intoxication au dioxyde de carbone.
- À partir de 1 % de CO₂ dans l’air, les premiers symptômes apparaissent.
- À 5 % de CO₂, une forte détresse respiratoire se manifeste.
- Au-delà de 10 %, la perte de conscience survient rapidement.
Les méthodes de recyclage de l’air dans un sous-marin – Une vision révolutionnaire
Les méthodes de traitement de l’air dans un espace clos, telles que décrites par Verne, étaient révolutionnaires pour son époque et ont été effectivement mises en œuvre plus tard.
Les solutions standards incluent :
- Le renouvellement mécanique de l’air par l’apport d’air extérieur.
- Le stockage de réserves d’air sous pression.
Mais Verne va encore plus loin en décrivant :
- La production d’oxygène à partir du chlorate de potassium est une méthode assez simple.
- L’absorption du CO₂ avec de l’hydroxyde de sodium (soude caustique), une technique qui est devenue une pratique courante dans les sous-marins modernes.
Verne démontre ainsi qu’il est parfaitement au fait des avancées scientifiques de son époque et que ses visions techniques étaient avant-gardistes.
La Nautilus utilise d’ailleurs toutes ces méthodes et même une autre innovation : la production d’oxygène par électrolyse de l’eau.
Mais cela ne sera mentionné que plus tard dans le récit.
La fin du chapitre – Un tournant inattendu
Une fois l’air renouvelé avec de l’air marin frais, Aronnax ressent immédiatement un soulagement.
Mais une nouvelle tension éclate avec Ned Land :
- Une débat s’engage sur l’attitude à adopter lors de leur prochaine rencontre avec l’équipage.
- Aronnax craint que l’agressivité du Canadien ne mette tout le monde en danger.
- Il parvient d’abord à le calmer, mais la faim croissante et la pression psychologique de leur captivité ravivent l’irritation de Ned.
Puis, l’événement déclencheur survient :
- Lorsque le steward finit par entrer dans la cellule après un long moment, Ned se jette immédiatement sur lui et tente de l’étrangler !
- Conseil et Aronnax interviennent pour l’arrêter.
Mais alors que la scène atteint son paroxysme, un rebondissement totalement inattendu survient :
Une personne leur adresse la parole en français !
Jusque-là, ils avaient supposé que l’équipage ne parlait aucune langue qu’ils connaissaient.
Et c’est sur ce cliffhanger magistral que se termine le chapitre.
– Sepp
CHAPITRE IX — LES COLÈRES DE NED LAND
Je ne sais pas combien de temps nous avons dormi, mais cela a dû être long. Quand je me suis réveillé, mes compagnons dormaient encore. Mon esprit était clair, et je regardai à nouveau notre prison. Rien n’avait changé. Nous étions toujours enfermés. La table avait été débarrassée pendant notre sommeil, mais il n’y avait aucun signe de changement de situation. J’ai commencé à me demander si nous allions rester enfermés pour toujours.
Je me sentais étrange. Ma respiration était difficile. L’air dans la pièce était lourd, et je comprenais que nous avions utilisé la plupart de l’oxygène. Chaque personne utilise beaucoup d’oxygène en une heure, et si l’air n’est pas renouvelé, il devient irrespirable. Il fallait que notre prison ait de l’air frais rapidement.
Je me demandais comment le capitaine du sous-marin faisait pour renouveler l’air. Utilisait-il des produits chimiques pour produire de l’oxygène ? Stockait-il de l’air sous pression pour le libérer selon les besoins ? Ou bien faisait-il remonter le sous-marin à la surface pour respirer comme une baleine ?
Soudain, un courant d’air frais entra dans notre cellule. C’était de l’air de la mer, avec une odeur de sel et d’iode. Je respirai à pleins poumons, soulagé. En m’observant, je sentis un léger mouvement du sous-marin. Il était remonté à la surface pour prendre de l’air. Je cherchai d’où venait cet air et trouvai un petit trou au-dessus de la porte. C’était une ouverture d’aération.
Mes compagnons se réveillèrent à ce moment. Conseil s’étira et me demanda :
« Monsieur a bien dormi ? »
« Oui, très bien, et vous ? » répondis-je.
« Comme une pierre ! » dit Ned Land. « Mais je sens comme une odeur de mer. »
Je lui expliquai ce qui s’était passé pendant qu’il dormait. Ned hocha la tête et dit :
« Cela explique les bruits que nous entendions quand nous étions sur l’Abraham Lincoln. Ce sous-marin respire comme une baleine ! »
Ensuite, il regarda autour de lui.
« Mais quelle heure est-il ? L’heure du dîner ? »
« Plutôt l’heure du petit-déjeuner, » dis-je. « Nous avons dormi une journée entière. »
« Peu importe, » dit Ned. « Que ce soit un dîner ou un déjeuner, je suis affamé ! »
« Attendons, » proposai-je. « Ils ne veulent pas nous laisser mourir de faim. »
« À moins qu’ils ne veuillent nous engraisser, » répliqua Ned Land en riant.
« N’y pensez pas, » dis-je. « Ces hommes ne sont pas des cannibales. »
Mais Ned Land était de plus en plus impatient. Il marchait de long en large, frappait les murs et grognait. Il avait faim et était en colère. Conseil restait calme, mais Ned n’arrêtait pas de se plaindre.
« Vous êtes bien patient, Conseil ! » s’exclama-t-il. « Moi, je ne supporte plus cette attente. »
« Cela ne sert à rien de se mettre en colère, » répondit Conseil.
Ned Land haussa les épaules.
« Croyez-vous qu’ils nous laisseront sortir un jour ? » demanda-t-il.
« Je ne sais pas, » répondis-je. « Mais nous avons peut-être appris un secret qu’ils veulent garder. Si c’est le cas, nous sommes en danger. Sinon, ils nous libéreront à la première occasion. »
« Et s’ils nous forcent à rejoindre leur équipage ? » demanda Conseil.
« Alors, nous devrons attendre une chance de nous échapper, » dit Ned Land.
« Comment ? » demandai-je.
« En prenant le contrôle du navire ! » s’exclama-t-il.
« Impossible ! » répliquai-je.
« Pourquoi ? » insista-t-il. « S’ils sont vingt, nous pouvons les surprendre. »
« Attendons, » dis-je. « Mais surtout, gardez votre calme. »
Ned Land promit, mais il était de plus en plus nerveux. L’attente lui pesait. Il frappait les murs de la cellule et jurait. Deux heures passèrent. Toujours rien. L’angoisse monta. J’avais espéré que le capitaine nous traiterait bien, mais maintenant, je doutais. Et si cet homme était cruel ? Allait-il nous laisser mourir de faim ?
Enfin, des bruits se firent entendre. Des pas approchaient. Quelqu’un ouvrit la porte. C’était le steward.
Avant que je puisse réagir, Ned Land lui sauta dessus. Il le renversa et le serra à la gorge. Le steward étouffait.
« Arrêtez ! » criai-je.
Conseil essaya de retenir Ned, mais le Canadien était trop fort.
Soudain, une voix sévère dit en français :
« Calmez-vous, maître Land, et écoutez-moi ! »
Tout le monde se figea.
– À SUIVRE –
1- Aronnax se réveille en même temps que ses compagnons.
2- L’air de la cellule était devenu difficile à respirer.
3- Aronnax identifie rapidement que le sous-marin remonte à la surface pour respirer.
4- Conseil est le plus impatient des trois prisonniers.e.
5- Ned Land pense que l’équipage du sous-marin pourrait être cannibale.
6- Aronnax propose immédiatement de tenter une évasion.
7- Ned Land accepte de rester calme, mais il a du mal à contrôler sa colère.
8- Le steward entre dans la cellule et est accueilli pacifiquement par Ned Land.
9- Un inconnu parle en français pour calmer la situation.
10- L’histoire se termine avec la libération des prisonniers.
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CHAPITRE IX — LES COLÈRES DE NED LAND
Je me réveille. J’ai bien dormi. Mes amis, Ned et Conseil, dorment encore. Je regarde autour de moi. Nous sommes toujours dans la même pièce. La porte est fermée. Nous sommes prisonniers. La table est vide. Quelqu’un a pris les assiettes pendant notre sommeil. Je me demande combien de temps nous allons rester ici.
Je respire mal. L’air est lourd. J’ai besoin d’air frais. Je pense au capitaine du bateau. Comment fait-il pour avoir de l’air ? Il a peut-être des bouteilles d’air. Ou alors, il remonte à la surface pour respirer comme une baleine. Tout à coup, un vent frais entre dans la pièce. L’air sent la mer. Je respire à plein poumons. C’est agréable. Le bateau doit être remonté à la surface.
Ned et Conseil se réveillent. Ils s’étirent et se frottent les yeux.
« Avez-vous bien dormi ? » demande Conseil.
« Oui, très bien, » dis-je.
« Moi aussi, » répond Ned. « Mais j’ai faim. »
Je regarde l’heure. Il est difficile de savoir si c’est le matin ou le soir. Ned pense qu’il est l’heure de manger.
« Nous avons dormi longtemps. Peut-être vingt-quatre heures, » dit Conseil.
« J’ai très faim, » dit Ned. « J’espère qu’on nous apportera à manger. »
Nous attendons, mais personne ne vient. Ned commence à s’énerver.
« Sommes-nous prisonniers pour toujours ? » demande-t-il.
« Je ne sais pas, » dis-je. « Peut-être qu’ils nous laisseront partir un jour. »
« Ou peut-être qu’ils veulent nous garder ici ! » dit Conseil.
« Nous devons nous échapper ! » dit Ned.
« C’est impossible, » dis-je. « Nous sommes sous l’eau. »
Ned réfléchit.
« Alors, nous devons prendre le bateau ! » dit-il. « Il y a peut-être seulement vingt hommes à bord. Nous pouvons gagner ! »
Je ne pense pas que ce soit une bonne idée. Mais Ned est têtu. Il veut essayer.
Le temps passe. Toujours personne. Nous avons très faim. Ned devient très en colère. Il marche de long en large. Il frappe les murs.
« Ils nous ont oubliés ! » crie-t-il.
Nous attendons encore. Deux heures passent. Soudain, nous entendons du bruit. Quelqu’un arrive. La porte s’ouvre. C’est un homme. Il apporte à manger.
Mais Ned est trop en colère. Il se jette sur lui. Il l’attrape par le cou. L’homme ne peut pas respirer. Conseil essaie d’aider. Je veux arrêter Ned.
Soudain, une voix parle en français :
« Calmez-vous, maître Land. Écoutez-moi ! »
– À SUIVRE –
1- Ned et Conseil se réveillent avant Aronnax.
2- Le bateau remonte à la surface pour renouveler l’air.
3- Ned est calme et patient en attendant le repas.
4- La porte s’ouvre et un homme apporte à manger.
5- L’homme qui entre parle en espagnol.
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8 Comments
Pascal · February 19, 2025 at 1:46 am
je pense que la colère n’est jamais bonne conseillère, surtout dans une situation telle que celle-là. La gestion des émotion s est primordiale dans ces moments. Je garde toujours en tête une formule de vie qui peut être salvatrice parfois. E + R = O.
Évènement + Réaction = Obtention, c’est notre réaction face à des évènements que l’on ne contrôle pas qui va faire ce que l’on va obtenir. Notre vie est ainsi faite de 10% de chose que nous ne contrôlons pas et de 90% de comment nous allons y réagir. Et là, la gestion des émotions est essentielle.
Une façon très ludique et intéressante d’apporter une méthode d’apprentissage de la langue comme tu le fait, bravo à toi.
JEROME - FRENCH WITH STORIES · February 19, 2025 at 11:01 am
Merci pour ton commentaire et cette belle formule E + R = O ! C’est une vraie clé dans bien des situations. Effectivement, Ned Land aurait eu tout intérêt à l’appliquer dans ce chapitre ! Son impulsivité lui joue des tours, et on voit bien que la gestion des émotions est essentielle. Heureusement qu’il a Aronnax et Conseil pour le tempérer ! 😉
Ketty · February 19, 2025 at 12:46 pm
Même si l’on considère les caractéristiques de l’environnement : faible oxygène, la faim, l’enfermement, la colère n’est jamais bonne conseillère. La réflexion méthodique d’Aronnax est le contrepoids de l’impulsivité de Ned.
Leur opposition symbolise le conflit entre raison et émotion, souvent présent dans notre quotidien 😉
JEROME - FRENCH WITH STORIES · February 19, 2025 at 12:59 pm
Merci pour ton commentaire ! 😊 Tu soulignes très bien l’opposition entre Aronnax et Ned Land, qui incarne ce tiraillement entre raison et émotion. C’est un conflit qui nous touche tous au quotidien, et Jules Verne l’exploite habilement pour enrichir son récit.
Magalie Vernet-Hanotaux · February 21, 2025 at 8:35 pm
Bonsoir
Le texte est en français cette fois. Est-ce normal ?
Les fois précédentes je les lisais en anglais.
Sinon c’est un superbe passage que j’ai plaisir à relire. Que ce soit en anglais ou en français !
JEROME - FRENCH WITH STORIES · February 22, 2025 at 11:45 am
Bonjour Magalie ! Oui, j’ai décidé de laisser l’introduction et la conclusion en français et de ne proposer l’anglais que dans un bouton déroulant pour celles et ceux qui en ont vraiment besoin. Mais le texte principal (l’histoire) a toujours été en français. Heureux que ce chapitre t’ait plu ! 😊
Rudy · February 22, 2025 at 8:27 am
Dans cette situation, il vaudrait mieux garder son sang froid et réfléchir pour augmenter ses chances de survie. Ce chapitre pourrait être une bonne analogie à nos réactions dans une situation qu’on ne maîtrise pas. Il est souvent plus facile d’écouter “notre Ned intérieur” plutôt que notre alors qu’on devrait plutôt suivre “notre Aronnax”.
JEROME - FRENCH WITH STORIES · February 22, 2025 at 11:50 am
C’est une très belle analogie ! Suivre « notre Aronnax » plutôt que « notre Ned intérieur » illustre bien le conflit entre la raison et l’impulsivité face à l’inconnu ou au danger. Jules Verne excelle justement dans ces dynamiques, en opposant des personnages aux réactions très contrastées. Ça peut aussi s’appliquer à plein d’autres aspects de la vie où garder son sang-froid et analyser la situation permet de mieux s’en sortir. Merci pour ton analyse juste ! 😊