In Chapter 3, Professor Aronnax’s adventurous spirit led him aboard the Abraham Lincoln to pursue the mysterious sea monster. Now, in Chapter 4, meet Ned Land, the fearless Canadian harpooner whose skill and skepticism challenge the crew’s belief in the beast. As the ship navigates uncharted waters, tensions rise, and the quest for the unknown becomes more gripping. Will Ned’s doubts prove true, or is the monster closer than they think?

Note: Enjoy the original French text of Jules Verne‘s 20,000 Leagues Under the Sea (⭐⭐⭐), or choose adapted versions for your level (⭐⭐ or ⭐) in the tabs below! 😊

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Beginner (A1/A2)

Perfect if you’re just starting out or brushing up on the basics, this level builds a strong foundation!


One star

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Intermediate (B1/B2)

For adventurers ready to take on more complex challenges, this level bridges the gap to fluency!

⭐⭐
Two stars

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Advanced (C1/C2)

If you’re comfortable with almost everything in French and ready for high-level texts, this is your path!

⭐⭐⭐
Three stars

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📖 Story (A1/A2)

CHAPITRE IV — NED LAND

Le commandant Farragut était un marin très courageux. Il croyait au monstre marin. Pour lui, il était réel, comme une baleine ou un cachalot. Il voulait absolument le trouver et le tuer. Son équipage pensait la même chose que lui. Tous étaient très motivés pour chercher ce grand animal.

Le bateau, l’Abraham-Lincoln, était bien équipé. Il avait des harpons, des canons, et des flèches pour attaquer le monstre. Un des canons pouvait tirer très loin, jusqu’à seize kilomètres. Mais la plus grande force du bateau était Ned Land. Ned Land était un harponneur très fort et très connu.


A tense scene inside a dark echoing cave with Armand Leclerc and Elodie Moreau cautiously advancing, looking around as if being followed

Ned Land venait du Canada. Il était grand, avec un regard intense. Il parlait peu, mais il était très bon dans son travail. Les baleines et les cachalots n’échappaient jamais à ses harpons. Il avait quarante ans et une grande expérience. Il avait aussi beaucoup d’histoires incroyables à raconter. Ces histoires venaient de ses voyages dans les mers froides.

Ned et le professeur Aronnax étaient devenus amis. Ils parlaient souvent ensemble. Ned aimait parler de son pays, le Canada, et de ses aventures. Mais il ne croyait pas au monstre marin. Selon lui, il n’existait pas. Un jour, Aronnax lui a demandé pourquoi il doutait. Ned a expliqué qu’il n’avait jamais vu un tel animal. Les baleines et les cachalots sont très grands, mais ils ne peuvent pas percer la coque en métal d’un bateau. Pour Ned, ces histoires de monstre étaient des inventions.

Aronnax n’était pas d’accord. Il pensait que le monstre existait vraiment. Il croyait que c’était un grand animal, très fort, avec une défense en corne capable de casser des bateaux. Il a expliqué à Ned que pour vivre dans les eaux très profondes, un animal doit être très solide pour résister à la forte pression. Cette pression, dans les grandes profondeurs, est énorme. Aronnax a donné des chiffres pour montrer combien c’était difficile. Ned écoutait, mais il restait sceptique.


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Une fois, le bateau Scotia avait été percé par quelque chose. Personne ne savait par quoi, mais il y avait un trou. Aronnax pensait que ce trou avait été fait par le monstre. Ned n’y croyait pas. Pour lui, cela restait un mystère. Mais Aronnax était convaincu. Il voulait trouver le monstre pour en avoir la preuve. Il pensait que c’était un cétacé, comme une baleine ou un dauphin, mais beaucoup plus grand et plus fort.

Le professeur Aronnax espérait que Ned Land verrait enfin le monstre et qu’il pourrait l’harponner. Mais pour cela, il fallait d’abord le rencontrer. C’était maintenant une question de chance. L’équipage continuait de chercher, jour après jour, sur la mer immense.


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– TO BE CONTINUED –

🤔 Quiz

1- Le commandant Farragut croit que le monstre marin existe.

VRAI 🙂 

2- Ned Land est un marin qui aime beaucoup parler.

FAUX 😮 – Ned Land parle peu et n’est pas très communicatif. 

3- Aronnax pense que le monstre est une invention.

FAUX 😮 Aronnax est convaincu que le monstre existe vraiment. 

4- Le bateau Scotia a eu un trou dans sa coque.

VRAI 🙂 

5- Le professeur Aronnax pense que le monstre est un poulpe géant.

FAUX 😮 – Aronnax pense que le monstre est un grand cétacé avec une défense très solide. 

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📖 Histoire (B1/B2)

CHAPITRE IV — NED LAND

Le commandant Farragut était un excellent marin, totalement dévoué à son navire, l’Abraham-Lincoln. Pour lui, il ne faisait aucun doute que le monstre marin existait. Il avait juré de le trouver et de débarrasser les mers de sa présence. Il était prêt à tout : soit il tuerait le monstre, soit le monstre le tuerait. Les officiers partageaient la même certitude. Tous surveillaient l’horizon, discutant des chances de rencontrer l’animal. Même les matelots étaient enthousiastes, prêts à harponner la créature et à la ramener à bord. Une récompense de deux mille dollars était promise à celui qui repérerait le monstre. Cela rendait tout l’équipage très attentif.

Moi aussi, j’observais la mer avec application. Seul Conseil, mon fidèle domestique, restait indifférent à toute cette agitation. Le commandant Farragut avait bien équipé son navire pour une telle chasse. Il y avait des harpons, des flèches barbelées et même un canon perfectionné qui pouvait tirer un projectile à seize kilomètres. L’Abraham-Lincoln possédait aussi une arme encore plus précieuse : Ned Land, un harponneur canadien exceptionnel.


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Ned Land était un homme de quarante ans, grand et robuste, avec un regard perçant. Il était réputé pour son sang-froid et sa précision. Peu bavard, il pouvait cependant devenir colérique quand on le contrariait. C’était un véritable expert dans son métier, capable de rivaliser avec les créatures les plus rusées des océans. Je trouvais que le commandant Farragut avait eu raison de recruter cet homme. Il représentait une force considérable pour l’équipage.

Bien que peu communicatif, Ned Land appréciait de parler français avec moi, sa langue d’origine. Sa famille venait de Québec, et il aimait évoquer ses racines. Petit à petit, il me racontait ses aventures dans les mers polaires. Ses récits, pleins de poésie, prenaient une dimension presque épique.

Un soir, le 30 juillet, trois semaines après notre départ, nous nous trouvions près des côtes de la Patagonie. La frégate avançait vers le détroit de Magellan et allait bientôt atteindre le Pacifique. Ned Land et moi étions assis sur la dunette, discutant de tout et de rien, quand je décidai de l’interroger sur le monstre marin.

« Ned, lui demandai-je, pourquoi ne croyez-vous pas à l’existence de cette créature que nous poursuivons ? »

Ned réfléchit un moment avant de répondre :
« Peut-être parce que je suis harponneur. J’ai déjà capturé beaucoup de baleines et de cachalots. Mais jamais je n’ai vu un animal capable d’endommager un navire en métal comme l’a été le Scotia. »

« Pourtant, des récits parlent de navires transpercés par des narvals », répliquai-je.
« Peut-être des navires en bois, mais jamais en métal », répondit Ned avec assurance.


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Je tentai alors d’expliquer pourquoi un animal de cette taille pourrait exister.
« Imaginez, Ned, un cétacé capable de vivre à de grandes profondeurs, où la pression est immense. Son organisme devrait être extrêmement solide pour résister à cette pression. »

« Vraiment ? » demanda-t-il en me regardant d’un air dubitatif.
« Oui, et je peux vous le prouver avec quelques chiffres. »

Je lui expliquai que la pression sous l’eau augmentait rapidement. À une profondeur de 9 753 mètres, un corps humain subirait une pression équivalente à des millions de kilogrammes. « Pour survivre à de telles profondeurs, un animal aurait besoin d’un squelette incroyablement résistant », ajoutai-je.

Ned resta sceptique, secouant la tête. « Peut-être », dit-il, sans toutefois se laisser convaincre totalement. Je continuai néanmoins à défendre mon hypothèse. Si un tel animal existait, il était logique qu’il puisse causer des dégâts considérables en frappant un navire.

Ned, cependant, concluait toujours par une réponse simple :
« Peut-être que ça n’est tout simplement pas vrai. »

Cette conversation montrait bien l’obstination du harponneur. Pour lui, le monstre marin restait une invention, malgré les preuves comme l’accident du Scotia. Pourtant, ce trou dans la coque du navire ne s’était pas fait tout seul. Selon moi, il avait forcément été causé par une créature marine. Mais pour en avoir le cœur net, il fallait la trouver, l’attraper et l’étudier.

Le mystère restait entier, et notre expédition continuait avec cette même question à résoudre : l’Abraham-Lincoln parviendrait-il à rencontrer ce monstre que tant de gens considéraient comme une légende ?


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– À SUIVRE –

🤔 Quiz

1- Le commandant Farragut croyait fermement à l’existence du monstre marin.

VRAI 🙂 

2- Le commandant Farragut avait promis une récompense de trois mille dollars pour celui qui repérerait le monstre.

FAUX 😮La récompense était de deux mille dollars. 

3- Conseil partageait l’enthousiasme de l’équipage pour la chasse au monstre.

FAUX 😮 – Conseil restait indifférent à toute cette agitation. 

4- L’Abraham-Lincoln était équipé d’un canon capable de tirer un projectile à seize kilomètres.

VRAI 🙂 

5- Ned Land était un harponneur anglais réputé pour son audace et son sang-froid.

FAUX 😮 – Ned Land était Canadien, originaire de Québec. 

6- Ned Land parlait peu, mais aimait discuter en français avec le narrateur.

VRAI 🙂 

7- Selon Ned Land, le Scotia avait été endommagé par un poulpe géant.

FAUX 😮 Ned Land ne croyait ni aux poulpes géants ni à l’existence du monstre marin. 

8- Le narrateur a expliqué à Ned que la pression sous-marine augmentait avec la profondeur.

VRAI 🙂 

9- Ned Land était convaincu par les arguments et les chiffres donnés par le narrateur.

FAUX 😮 Ned restait sceptique et ne voulait pas admettre l’existence du monstre. 

10- Le narrateur pensait que le trou dans la coque du Scotia était dû à un animal inconnu.

VRAI 🙂 


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📖 Histoire (C1/C2)

CHAPITRE IV — NED LAND

Le commandant Farragut était un bon marin, digne de la frégate qu’il commandait. Son navire et lui ne faisaient qu’un. Il en était l’âme. Sur la question du cétacé, aucun doute ne s’élevait dans son esprit, et il ne permettait pas que l’existence de l’animal fût discutée à son bord. Il y croyait comme certaines bonnes femmes croient au Léviathan, — par foi, non par raison. Le monstre existait, il en délivrerait les mers, il l’avait juré. C’était une sorte de chevalier de Rhodes, un Dieudonné de Gozon, marchant à la rencontre du serpent qui désolait son île. Ou le commandant Farragut tuerait le narwal, ou le narwal tuerait le commandant Farragut. Pas de milieu.

Les officiers du bord partageaient l’opinion de leur chef. Il fallait les entendre causer, discuter, disputer, calculer les diverses chances d’une rencontre, et observer la vaste étendue de l’Océan. Plus d’un s’imposait un quart volontaire dans les barres de perroquet, qui eût maudit une telle corvée en toute autre circonstance. Tant que le soleil décrivait son arc diurne, la mâture était peuplée de matelots auxquels les planches du pont brûlaient les pieds, et qui n’y pouvaient tenir en place ! Et cependant, l’Abraham-Lincoln ne tranchait pas encore de son étrave les eaux suspectes du Pacifique.

Quant à l’équipage, il ne demandait qu’à rencontrer la licorne, à la harponner, à la hisser à bord, à la dépecer. Il surveillait la mer avec une scrupuleuse attention. D’ailleurs, le commandant Farragut parlait d’une certaine somme de deux mille dollars, réservée à quiconque, mousse ou matelot, maître ou officier, signalerait l’animal. Je laisse à penser si les yeux s’exerçaient à bord de l’Abraham-Lincoln.

Pour mon compte, je n’étais pas en reste avec les autres, et je ne laissais à personne ma part d’observations quotidiennes. La frégate aurait eu cent fois raison de s’appeler l’Argus. Seul entre tous, Conseil protestait par son indifférence touchant la question qui nous passionnait, et détonait sur l’enthousiasme général du bord.

J’ai dit que le commandant Farragut avait soigneusement pourvu son navire d’appareils propres à pêcher le gigantesque cétacé. Un baleinier n’eût pas été mieux armé. Nous possédions tous les engins connus, depuis le harpon qui se lance à la main, jusqu’aux flèches barbelées des espingoles et aux balles explosibles des canardières. Sur le gaillard d’avant s’allongeait un canon perfectionné, se chargeant par la culasse, très-épais de parois, très-étroit d’âme, et dont le modèle doit figurer à l’Exposition universelle de 1867. Ce précieux instrument, d’origine américaine, envoyait, sans se gêner, un projectile conique de quatre kilogrammes à une distance moyenne de seize kilomètres.

Donc, l’Abraham-Lincoln ne manquait d’aucun moyen de destruction. Mais il avait mieux encore. Il avait Ned Land, le roi des harponneurs.


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Ned Land était un Canadien, d’une habileté de main peu commune, et qui ne connaissait pas d’égal dans son périlleux métier. Adresse et sang-froid, audace et ruse, il possédait ces qualités à un degré supérieur, et il fallait être une baleine bien maligne, ou un cachalot singulièrement astucieux pour échapper à son coup de harpon.

Ned Land avait environ quarante ans. C’était un homme de grande taille, — plus de six pieds anglais, — vigoureusement bâti, l’air grave, peu communicatif, violent parfois, et très-rageur quand on le contrariait. Sa personne provoquait l’attention, et surtout la puissance de son regard qui accentuait singulièrement sa physionomie.

Je crois que le commandant Farragut avait sagement fait d’engager cet homme à son bord. Il valait tout l’équipage, à lui seul, pour l’œil et le bras. Je ne saurais le mieux comparer qu’à un télescope puissant qui serait en même temps un canon toujours prêt à partir.

Qui dit Canadien, dit Français, et, si peu communicatif que fût Ned Land, je dois avouer qu’il se prit d’une certaine affection pour moi. Ma nationalité l’attirait sans doute. C’était une occasion pour lui de parler, et pour moi d’entendre cette vieille langue de Rabelais qui est encore en usage dans quelques provinces canadiennes. La famille du harponneur était originaire de Québec, et formait déjà une tribu de hardis pêcheurs à l’époque où cette ville appartenait à la France.

Peu à peu, Ned prit goût à causer, et j’aimais à entendre le récit de ses aventures dans les mers polaires. Il racontait ses pêches et ses combats avec une grande poésie naturelle. Son récit prenait une forme épique, et je croyais écouter quelque Homère canadien, chantant l’Iliade des régions hyperboréennes.

Je dépeins maintenant ce hardi compagnon, tel que je le connais actuellement. C’est que nous sommes devenus de vieux amis, unis de cette inaltérable amitié qui naît et se cimente dans les plus effrayantes conjonctures ! Ah ! brave Ned ! je ne demande qu’à vivre cent ans encore, pour me souvenir plus longtemps de toi !

Et maintenant, quelle était l’opinion de Ned Land sur la question du monstre marin ? Je dois avouer qu’il ne croyait guère à la licorne, et que, seul à bord, il ne partageait pas la conviction générale. Il évitait même de traiter ce sujet, sur lequel je crus devoir l’entreprendre un jour.

Par une magnifique soirée du 30 juillet, c’est-à-dire trois semaines après notre départ, la frégate se trouvait à la hauteur du cap Blanc, à trente milles sous le vent des côtes patagonnes. Nous avions dépassé le tropique du Capricorne, et le détroit de Magellan s’ouvrait à moins de sept cent milles dans le sud. Avant huit jours, l’Abraham-Lincoln sillonnerait les flots du Pacifique.

Assis sur la dunette, Ned Land et moi, nous causions de choses et d’autres, regardant cette mystérieuse mer dont les profondeurs sont restées jusqu’ici inaccessibles aux regards de l’homme. J’amenai tout naturellement la conversation sur la licorne géante, et j’examinai les diverses chances de succès ou d’insuccès de notre expédition. Puis, voyant que Ned me laissait parler sans trop rien dire, je le poussai plus directement.

« Comment, Ned, lui demandai-je, comment pouvez-vous ne pas être convaincu de l’existence du cétacé que nous poursuivons ? Avez-vous donc des raisons particulières de vous montrer si incrédule ? »

Le harponneur me regarda pendant quelques instants avant de répondre, frappa de sa main son large front par un geste qui lui était habituel, ferma les yeux comme pour se recueillir, et dit enfin :

« Peut-être bien, monsieur Aronnax.

— Cependant, Ned, vous, un baleinier de profession, vous qui êtes familiarisé avec les grands mammifères marins, vous dont l’imagination doit aisément accepter l’hypothèse de cétacés énormes, vous devriez être le dernier à douter en de pareilles circonstances !

— C’est ce qui vous trompe, monsieur le professeur, répondit Ned. Que le vulgaire croie à des comètes extraordinaires qui traversent l’espace, ou à l’existence de monstres antédiluviens qui peuplent l’intérieur du globe, passe encore, mais ni l’astronome, ni le géologue n’admettent de telles chimères. De même, le baleinier. J’ai poursuivi beaucoup de cétacés, j’en ai harponné un grand nombre, j’en ai tué plusieurs, mais si puissants et si bien armés qu’ils fussent, ni leurs queues, ni leurs défenses n’auraient pu entamer les plaques de tôle d’un steamer.

— Cependant, Ned, on cite des bâtiments que la dent du narwal a traversés de part en part.

— Des navires en bois, c’est possible, répondit le Canadien, et encore, je ne les ai jamais vus. Donc, jusqu’à preuve contraire, je nie que baleines, cachalots ou licornes puissent produire un pareil effet.

— Écoutez-moi, Ned…

— Non, monsieur le professeur, non. Tout ce que vous voudrez excepté cela. Un poulpe gigantesque, peut-être ?…

— Encore moins, Ned. Le poulpe n’est qu’un mollusque, et ce nom même indique le peu de consistance de ses chairs. Eût-il cinq cents pieds de longueur, le poulpe, qui n’appartient point à l’embranchement des vertébrés, est tout à fait inoffensif pour des navires tels que le Scotia ou l’Abraham-Lincoln. Il faut donc rejeter au rang des fables les prouesses des Krakens ou autres monstres de cette espèce.

— Alors, monsieur le naturaliste, reprit Ned Land d’un ton assez narquois, vous persistez à admettre l’existence d’un énorme cétacé… ?

— Oui, Ned, je vous le répète avec une conviction qui s’appuie sur la logique des faits. Je crois à l’existence d’un mammifère, puissamment organisé, appartenant à l’embranchement des vertébrés, comme les baleines, les cachalots ou les dauphins, et muni d’une défense cornée dont la force de pénétration est extrême.

— Hum ! fit le harponneur, en secouant la tête de l’air d’un homme qui ne veut pas se laisser convaincre.


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— Remarquez, mon digne Canadien, repris-je, que si un tel animal existe, s’il habite les profondeurs de l’Océan, s’il fréquente les couches liquides situées à quelques milles au-dessous de la surface des eaux, il possède nécessairement un organisme dont la solidité défie toute comparaison.

— Et pourquoi cet organisme si puissant ? demanda Ned.

— Parce qu’il faut une force incalculable pour se maintenir dans les couches profondes et résister à leur pression.

— Vraiment ? dit Ned qui me regardait en clignant de l’œil.

— Vraiment, et quelques chiffres vous le prouveront sans peine.

— Oh ! les chiffres ! répliqua Ned. On fait ce qu’on veut avec les chiffres !

— En affaires, Ned, mais non en mathématiques. Écoutez-moi. Admettons que la pression d’une atmosphère soit représentée par la pression d’une colonne d’eau haute de trente-deux pieds. En réalité, la colonne d’eau serait d’une moindre hauteur, puisqu’il s’agit de l’eau de mer dont la densité est supérieure à celle de l’eau douce. Eh bien, quand vous plongez, Ned, autant de fois trente-deux pieds d’eau au-dessus de vous, autant de fois votre corps supporte une pression égale à celle de l’atmosphère, c’est-à-dire de kilogrammes par chaque centimètre carré de sa surface. Il suit de là qu’à trois cent vingt pieds cette pression est de dix atmosphères, de cent atmosphères à trois mille deux cents pieds, et de mille atmosphères à trente-deux mille pieds, soit deux lieues et demie environ. Ce qui équivaut à dire que si vous pouviez atteindre cette profondeur dans l’Océan, chaque centimètre carré de la surface de votre corps subirait une pression de mille kilogrammes. Or, mon brave Ned, savez-vous ce que vous avez de centimètres carrés en surface ?

— Je ne m’en doute pas, monsieur Aronnax.

— Environ dix-sept mille.

— Tant que cela ?

— Et comme en réalité la pression atmosphérique est un peu supérieure au poids d’un kilogramme par centimètre carré, vos dix-sept mille centimètres carrés supportent en ce moment une pression de dix-sept mille cinq cent soixante-huit kilogrammes.

— Sans que je m’en aperçoive ?

— Sans que vous vous en aperceviez. Et si vous n’êtes pas écrasé par une telle pression, c’est que l’air pénètre à l’intérieur de votre corps avec une pression égale. De là un équilibre parfait entre la poussée intérieure et la poussée extérieure, qui se neutralisent, ce qui vous permet de les supporter sans peine. Mais dans l’eau, c’est autre chose.

— Oui, je comprends, répondit Ned, devenu plus attentif, parce que l’eau m’entoure et ne me pénètre pas.

— Précisément, Ned. Ainsi donc, à trente-deux pieds au-dessous de la surface de la mer, vous subiriez une pression de dix-sept mille cinq cent soixante-huit kilogrammes; à trois cent vingt pieds, dix fois cette pression, soit cent soixante-quinze mille six cent quatre-vingt kilogrammes ; à trois mille deux cents pieds, cent fois cette pression, soit dix-sept cent cinquante-six mille huit cent kilogrammes ; à trente-deux mille pieds, enfin, mille fois cette pression, soit dix-sept millions cinq cent soixante-huit mille kilogrammes ; c’est-à-dire que vous seriez aplati comme si l’on vous retirait des plateaux d’une machine hydraulique !

— Diable ! fit Ned.

— Eh bien, mon digne harponneur, si des vertébrés, longs de plusieurs centaines de mètres et gros à proportion, se maintiennent à de pareilles profondeurs, eux dont la surface est représentée par des millions de centimètres carrés, c’est par milliards de kilogrammes qu’il faut estimer la poussée qu’ils subissent. Calculez alors quelle doit être la résistance de leur charpente osseuse et la puissance de leur organisme pour résister à de telles pressions.

— Il faut, répondit Ned Land, qu’ils soient fabriqués en plaques de tôle de huit pouces, comme les frégates cuirassées.

— Comme vous dites, Ned, et songez alors aux ravages que peut produire une pareille masse lancée avec la vitesse d’un express contre la coque d’un navire.

— Oui… en effet… peut-être, répondit le Canadien, ébranlé par ces chiffres, mais qui ne voulait pas se rendre.

— Eh bien, vous ai-je convaincu ?

— Vous m’avez convaincu d’une chose, monsieur le naturaliste, c’est que si de tels animaux existent au fond des mers, il faut nécessairement qu’ils soient aussi forts que vous le dites.


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— Mais s’ils n’existent pas, entêté harponneur, comment expliquez-vous l’accident arrivé au Scotia ?

— C’est peut-être…, dit Ned hésitant.

— Allez donc !

— Parce que… ça n’est pas vrai ! » répondit le Canadien, en reproduisant sans le savoir une célèbre réponse d’Arago.

Mais cette réponse prouvait l’obstination du harponneur et pas autre chose. Ce jour-là, je ne le poussai pas davantage. L’accident du Scotia n’était pas niable. Le trou existait si bien qu’il avait fallu le boucher, et je ne pense pas que l’existence d’un trou puisse se démontrer plus catégoriquement. Or, ce trou ne s’était pas fait tout seul, et puisqu’il n’avait pas été produit par des roches sous-marines ou des engins sous-marins, il était nécessairement dû à l’outil perforant d’un animal.

Or, suivant moi, et pour toutes les raisons précédemment déduites, cet animal appartenait à l’embranchement des vertébrés, à la classe des mammifères, au groupe des pisciformes, et finalement à l’ordre des cétacés. Quant à la famille dans laquelle il prenait rang, baleine, cachalot ou dauphin, quant au genre dont il faisait partie, quant à l’espèce dans laquelle il convenait de le ranger, c’était une question à élucider ultérieurement. Pour la résoudre, il fallait disséquer ce monstre inconnu, pour le disséquer le prendre, pour le prendre le harponner, — ce qui était l’affaire de Ned Land, — pour le harponner le voir, — ce qui était l’affaire de l’équipage, — et pour le voir le rencontrer, — ce qui était l’affaire du hasard.


– À SUIVRE –

🤔 Quiz

1- Le commandant Farragut croyait à l’existence du monstre marin par raison scientifique.

FAUX 😮 – Il y croyait par foi, comme certaines bonnes femmes croient au Léviathan. 

2- Le commandant Farragut avait promis une récompense de deux mille dollars à celui qui signalerait le monstre.

VRAI 🙂 

3- L’Abraham-Lincoln était équipé d’un canon perfectionné fabriqué en Europe.

FAUX 😮 – Ce canon était d’origine américaine et pouvait projeter un projectile conique à seize kilomètres. 

4- Ned Land était d’origine française et parlait une version ancienne de la langue française.

VRAI 🙂 

5- Ned Land croyait fermement à l’existence du monstre marin.

FAUX 😮 – Il restait sceptique et ne partageait pas la conviction générale de l’équipage. 

6- Selon Ned Land, un poulpe géant pourrait percer les plaques d’un navire comme le Scotia.

FAUX 😮 – Il rejetait cette idée, car le poulpe n’appartient pas aux vertébrés et n’est pas assez solide. 

7- D’après Aronnax, la pression à 32 000 pieds sous l’eau équivaut à 17 millions de kilogrammes par centimètre carré.

FAUX 😮 – Elle équivaut à 17 millions 568 mille kilogrammes au total pour toute la surface d’un corps humain. 

8- Ned Land était convaincu par les arguments mathématiques d’Aronnax sur la pression sous-marine.

FAUX 😮 – Il était ébranlé mais restait sceptique, refusant de croire sans preuve tangible. 

9- Le trou dans la coque du Scotia prouvait l’existence d’un animal marin doté d’un outil perforant.

VRAI 🙂 

10- Aronnax pensait que le monstre appartenait à l’ordre des vertébrés et à la classe des amphibiens.

FAUX 😮 – Il pensait qu’il appartenait à l’ordre des vertébrés et à la classe des mammifères. 

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🪶 Student Analysis

Nous arrivons maintenant au chapitre où apparaît un autre protagoniste et héros de l’histoire, Ned Land. Mais avant cela, Verne décrit l’autorité absolue du capitaine Farragut et sa conviction inébranlable que le monstre marin est une espèce inconnue de mammifère marin. Il fait ici une remarque quelque peu désobligeante, comparant le capitaine aux “bonnes femmes”, qui, sans expérience spécifique, croient au “Léviathan”. Le Léviathan est une créature marine mythique mentionnée plusieurs fois dans la Bible. Il symbolise la nature sauvage et indomptée de la mer et n’a d’ailleurs rien à voir avec le “grand poisson” censé avoir avalé Jonas. On évoque également Dieudonné de Gozon, le 27e grand maître de l’ordre des Hospitaliers sur l’île de Rhodes au XIVe siècle. Selon la légende, il aurait, contre l’ordre de son maître de l’époque, tué un dragon qui vivait dans un marais. La tête coupée de ce dragon fut accrochée à l’une des sept portes de la forteresse, mais, un siècle plus tard, elle fut identifiée comme étant celle d’un grand crocodile.

L’équipage entier de l’Abraham-Lincoln est constamment à l’affût du monstre. Cependant, cette vigilance n’est pas seulement motivée par la loyauté, mais aussi par une récompense de 2 000 dollars offerte à celui qui le découvrirait en premier. Verne utilise ici le nom de “Licorne”, qui désigne normalement une créature fabuleuse ressemblant à un cheval avec une corne unique sur le front. Toutefois, étant donné que cette créature est souvent associée à la mer et que l’on suppose que le narval est à l’origine de ce mythe, l’utilisation de ce terme comme synonyme semble ici appropriée. Aronnax mentionne que la frégate pourrait également s’appeler “Argus”, en référence au géant de la mythologie grecque doté de cent yeux, dont seulement deux restaient fermés lorsqu’il dormait. C’est pourquoi l’on dit aujourd’hui observer quelque chose avec des “yeux d’Argus”.

S’ensuit une description de l’équipement de chasse de la frégate Abraham-Lincoln. Outre l’artillerie habituelle, elle est équipée d’outils de chasse à la baleine, tels que des harpons. Verne mentionne également un dispositif pour lancer des flèches barbelées, ainsi qu’une “canardière” pour des projectiles explosifs. Une canardière était un fusil de chasse surdimensionné, conçu pour tirer sur des volées entières de canards. L’idée d’équiper une telle arme de projectiles explosifs est une exagération, utilisée par Verne pour souligner que tout ce qui était technologiquement possible avait été mobilisé. L’équipement comprend également un canon à chargement par la culasse, qui aurait été présenté à l’Exposition universelle de 1867. Bien que cette arme soit fictive, Verne fait référence aux avancées technologiques de l’époque en artillerie. Les canons à chargement par la culasse furent utilisés pour la première fois lors de la guerre de Crimée (1853-1856), et l’ingénieur allemand Krupp présenta effectivement un tel canon à l’Exposition universelle.

C’est à ce moment-là que le harponneur Ned Land fait son apparition. Il est décrit comme pragmatique, audacieux et peu loquace. Il contraste avec les érudits Aronnax et Conseil, qui manquent d’habileté pratique. Verne a probablement choisi son nom pour souligner ses origines canadiennes : Ned est l’abréviation courante d’Edward ou Édouard, qui signifie “gardien des trésors”. Avec le nom de famille Land, Verne semble vouloir évoquer son attachement à la terre ferme. Ned est originaire de Québec, où l’on parle un français légèrement archaïque que Verne compare à celui de Rabelais, écrivain du XVIe siècle. Après s’être lié d’amitié avec lui, Aronnax débat avec Ned de l’existence d’un narval gigantesque. Ned Land ne croit qu’à ce qu’il a vu durant sa carrière de chasseur de baleines et rejette donc l’idée d’un tel animal. Aronnax tente de le convaincre avec des arguments scientifiques, mais en vain. Ned remet même en question l’incident de la Scotia.Aronnax compare cela à la “réponse d’Arago” : Arago avait confirmé par des expériences la nature ondulatoire de la lumière proposée par Fresnel, bien que cela ait été fortement contesté par la science de l’époque. Cette comparaison symbolise l’idée que “ce qui ne devrait pas exister, ne peut exister”, ou simplement l’entêtement. Aronnax reste convaincu de sa théorie sur un mammifère marin et considère la frégate, son équipage, et surtout Ned Land comme des instruments pour prouver cette hypothèse.

– Sepp

🗺️ The Journey Goes On…

As the Abraham Lincoln sails further into the Pacific, anticipation grows. Ned Land’s expertise could be the key to unraveling the mystery—or to survival itself. What dangers lie ahead? Dive into Chapter 5 to join this bold crew as they inch closer to their elusive quarry. Don’t miss the next thrilling chapter! Explore, question, and keep the adventure alive.

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6 Comments

Miren · December 9, 2024 at 7:08 am

Ton histoire m’a replongée dans l’univers captivant de Jules Verne avec un focus original sur Ned Land. 🌊🦄 J’ai adoré ta manière de remettre en lumière ce personnage souvent éclipsé par d’autres protagonistes plus médiatisés. Tu réussis à lui donner une profondeur et une humanité qui m’ont fait réfléchir à son rôle clé dans Vingt mille lieues sous les mers.
Merci pour ce voyage littéraire enrichissant et inspirant. Ça donne envie de relire Verne avec un œil neuf ! 😊

    JEROME - FRENCH WITH STORIES · December 9, 2024 at 9:21 am

    Merci beaucoup pour ton message, ça me fait vraiment plaisir ! 😊 Et ce n’est que le début de l’aventure avec Ned ! Ravi que ça t’ait inspiré, et j’espère te faire voyager encore avec les prochaines histoires ! 🌊

Antoine M · December 9, 2024 at 1:11 pm

Je viens de découvrir ton blog je trouve ça génial ! L’histoire est bien écrite en plus ! On s’y plonge vite Merci ! ☺️

    JEROME - FRENCH WITH STORIES · December 9, 2024 at 1:27 pm

    Merci beaucoup pour ton retour ! Ça me fait vraiment plaisir que l’histoire t’ait plu, et ce n’est que le début ! 😊

Jackie · December 10, 2024 at 9:11 am

La manière dont tu explores son scepticisme face aux légendes maritimes, le rend encore plus humain et attachant. Ton analyse approfondie de ce personnage emblématique de Jules Verne est à la fois instructive et divertissante. Merci de nous offrir une nouvelle perspective sur ce harponneur intrépide.

    JEROME - FRENCH WITH STORIES · December 10, 2024 at 12:16 pm

    Merci beaucoup pour ton retour si chaleureux ! Je suis ravi que cette perspective sur Ned Land t’ait plu. 😊

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